Paradoxe de Schrödinger : l’éclairage par le concept d’information et de non applicabilité de notre temps usuel

 

Soit le chat célébrissime enfermé dans une boîte et dont l’état de survie dépend de l’ouverture stochastique suite à la désintégration d’une particule d’une fiole contenant un gaz mortel. L’état du chat n’est pas connu de l’observateur à l’extérieur de la boîte. Le paradoxe indiquerait que l’état du chat est flou (mort et vivant) tant qu’il n’est pas observé.

Mais une information captée par l’observateur ne doit  jamais être contradictoire d’une information locale.

Appelons, par analogie avec la notion des variables d’espace-temps en relativité, information propre celle perçue localement par un observateur sur lui-même et impropre l’information perçue par un observateur externe.

En relativité l’information est quantitative sur un intervalle de temps ou un intervalle d’espace  En physique quantique son équivalent est  une information reliée à une observable (le processus de mesure permet de déterminer une valeur propre observée à partir des états potentiels qui composent un spectre de valeurs, ces états potentiels étant toutes les combinaisons linéaires des valeurs propres).

On peut alors, comme dans cette expérience du chat, corréler les mesures de l’’état d’un quanta par un détecteur avec des évènements macroscopiques comme l’ouverture ou pas d’une fiole mortelle pour le chat. L’état du chat mort ou vivant est intriquée à l’état de la particule, désintégrée ou pas. Mais si le système particule –chat nécessite d’être décrit par le formalisme quantique alors la combinaison linéaire des états propres conduit à décrire l état du système comme la superposition de tous ses états propres et donc à un état simultané (particule non désintégré-chat vivant) et (particule désintégrée –chat mort) , sans qu’aucun des deux termes puise être sélectionné avant l’observation.

Or c’est bien cette simultanéité selon le temps de l’observateur externe qui est au cœur de la confusion. Nous verrons plus loin que le temps évènementiel de l’observateur ne s’applique pas à la description d’un système décrit par la physique quantique entre deux observations.

Mais le premier point essentiel  est que tout système quantique s’échantillonne à une fréquence dépendant de sa taille, ou plus précisément de la durée pendant laquelle le système peut demeurer sans interaction avec l’extérieur, cette durée  se réduisant avec le nombre de constituants élémentaires du système.

Le chat exerce sur lui-même localement une mesure à une fréquence très élevée (liée au nombre de particules du chat en interaction par un effet dit de décohérence) la fonction d’onde décrivant la quasi infinité des états combinées de chaque atome du système particule-chat s’effondrant en un état unique (particule non désintégré-chat vivant) ou (particule désintégrée –chat mort),ou étant une union exclusive. En quelque sorte, le terme de couplage entre ces deux états a été dilué dans l’ensemble des axes de liberté du système « particule-chat ».

Donc à un moment très rapproché après que la fiole ait diffusé  son gaz mortel le chat commence  à mourir (l’ensemble des constituants du chat se détermine continument, au vu du nombre d’atomes en interaction, en des états uniques qui correspondent macroscopiquement à des états biologiques de plus en plus dégradés) et le chat en tant qu’entité biologique consciente et auto observatrice se perçoit comme mourant.

Inversement, tant que la particule n’a pas transité la fiole reste fermée et le chat s’échantillonne comme toujours vivant

 

Ouvrons une parenthèse pour préciser que le dispositif expérimental ne peut s’abstraire des relations d’indétermination d’Heisenberg et en conséquence induit des cas particuliers.

En effet le dispositif de détection de la particule désintégré s’auto-échantillonne lui aussi. Et même si la particule n’a pas encore transité pour activer le mécanisme macroscopique d’ouverture il existe une probabilité non nulle que le dispositif s’active par effet tunnel (une autre particule émergeante grâce à la relation d’indétermination d’Heisenberg provoque l’enclenchement du mécanisme d’ouverture)

Et il existe une probabilité plus faible encore que le dispositif s’active puis se désactive (en fait une probabilité infime, car le mécanisme d’ouverture provoque par amplification un effet mécanique à partir de la détection d’une particule, il faudrait que l’ensemble du mécanisme d’ouverture et la fiole transite en une position de fermeture ce qui est improbable, euphémisme pour un nombre considérable d’atomes) . Après que la particule ait transité provoquant l’ouverture de la fiole grâce à un mécanisme macroscopique la probabilité qu’il reste ouvert est donc considérablement renforcée.

Considérons pourtant un instant cette configuration quasi miraculeuse dans laquelle le chat serait seulement malade. L’état macroscopique du chat (sa santé) va être corrélé à la quantité de gaz diffusé, plus le temps passe plus il y a une chance d’une re fermeture miraculeuse mais cette espérance est totalement écrasée par la diffusion rapide d’une quantité de gaz mortelle.

En final il y a  une probabilité extrêmement proche de la certitude qu’il meure si le bouchon est ouvert, une probabilité extrêmement proche de la certitude qu’il demeure vivant si le bouchon est fermé et dans un reliquat improbable un  continuum d’état de perturbation de la santé du chat si le bouchon transite (par effet tunnel de l’état ouvert à l’état fermé)

Donc la description n’est pas univoque.

Mais oublions ce détail et regardons maintenant ce qui se passe du côté de l’observateur.

On pourrait en préalable objecter que la boîte où est enfermée le chat  ne peut jamais être totalement isolée de l’extérieur et que la mort du chat étant l’arrêt du métabolisme il y aurait réduction de l’émission thermique de la boîte ce qui informerait l’observateur sans qu’il ait à ouvrir la porte.

Négligeons ce point

L’observateur externe ne dispose pas en principe de l’information sur l’état du chat tant qu’il n’ouvre pas la porte. Ceci suppose que la porte demeure fermée sans action volontaire. Mais là aussi, comme pour le détecteur, il y a un intervalle de temps entre le début du placement de l’observateur à l’extérieur et le moment où il se décide à ouvrir et dans sa description quantique, toute porte peut s’ouvrir ou se fermer spontanément par effet tunnel. On a le même problème que dans le cas de la fiole ; la fiole qui se refermerait après un temps plus ou moins réduit fait varier la dose de gaz qui n’est pas forcément létale. Pour la porte l’ouverture puis la refermeture après un temps plus ou moins long  détermine  la probabilité que l’observateur ait pu capter suffisamment de photons pour déterminer l’état du chat. Mais là encore oublions ce détail.

On pourrait également considérer la probabilité non nulle mais encore plus infinitésimale que précédemment pour laquelle les conditions de l’expérience seraient annulées. Dans l’ensemble corrélé boite +observateur soumise aux relations d’indétermination d’Heisenberg l’observateur pourrait être fusionné avec la boîte (c’est l’observateur qui est détruit) voire que sa localisation le déplace globalement dans la boite et survivre si elle n’est pas trop petite et observer l’état du chat, ceci rejoint le problème de la porte qui s’ouvre par effet tunnel.

 Bien sur si la porte était l’horizon d’un trou noir l’observateur ne pourrait plus se prononcer car l’information qui s’en échappe par le rayonnement Hawking est totalement stochastique et ne dépend que de la masse résultante du trou noir et non pas d’une quelconque organisation ou désorganisation de l’information sur le chat qui y serait plongé.

La seule façon pour l’observateur d’acquérir de l’information serait de rentrer dans l’horizon. (Et il n’y a pas de théorie qui permette de décrire les fluctuations de l’horizon du trou noir par effet quantique alors que la fluctuation de position entre l’observateur et la boite classique est décrite par le modèle actuel de la physique quantique).

 

Mais revenons au cœur du problème. Là où le raisonnement simpliste du paradoxe ne tient pas c’est que, l’information impropre acquise par l’observateur lorsque l’information sur le chat lui parvient ne doit jamais être contradictoire avec l’information acquise localement par le chat sur son propre état.

La physique perdrait tout sens si le chat se jugeait vivant et que l’observateur le jugeait mort.

Or ceci surviendrait si deux transitions quantiques contradictoires viendraient influencer l’état du chat et ceci malgré l’interprétation quantique d’Everett.

 

L’interprétation d’Everett est d’affirmer que tout processus de mesure scinde en deux états binaires l’univers vu comme un tout et ceci instantanément

Pourquoi parler d’instantanéité? Pourquoi ne pas envisager qu’un effondrement quantique local se propage classiquement à la célérité de lumière?

 Si l’on imagine que l’univers pourrait se scinder progressivement à l’image d’une fermeture éclair à deux dimensions , transformant causalement l’univers ( la particule transite ou pas donc le chat  meurt ou pas donc l’univers est informé de la mort du chat, ou pas) il faut imaginer que pour tout les  autres points dotés de matière et à tout moment  d’autres interactions se produisent et que les effondrements quantiques dans un nouvel état unique feraient aussi basculer causalement leur environnement en fonction de ce nouvel état ce qui pourrait conduire à des ondes de propagation de l’information qui lors de leur rencontre seraient contradictoires (imaginez deux particules et deux fioles  de part et d’autre du chat, l’une ouverte l’autre fermé ; le chat ne saurait plus où se mettre . Il serait même dans notre monde classique vivant et mort. Mais laissons les zombies pour le mauvais cinéma).

Conclusion l’interprétation d’Everett implique que l’univers bascule immédiatement comme un tout.

Or ceci est parfaitement contradictoire avec la relativité restreinte qui repose sur le postulat que toute information sur un état macroscopique ne se propage qu’à la vitesse de la lumière

 

Il pourrait être mis en avant que les expériences d’intrication quantique démontrent expérimentalement qu’un état quantique bascule l’état d’un système intriqué indépendamment de l’intervalle d’espace et de temps considéré.

Mais la relativité restreinte n’est compatible qu’avec une corrélation instantanée du basculement d’une observable quantique prenant des valeurs discrètes et uniquement  dans le cas d’un système de particules initialement corrélées puis séparées par un intervalle d’espace-temps au moment de la mesure d’un état quantique. Et surtout seuls les états quantiques discrets (comme le spin, couleur, isospin pour un fermion ou la polarisation pour un boson) dont les états ne peuvent pas être prévus à l’avance font l’objet de cette dérogation par la relativité restreinte (car ces observables quantiques ne sont pas soumises à l’incertitude quantique comme la position ou la quantité de mouvement et ne peuvent pas être exploitées pour violer les lois de la causalité).

Donc l’interprétation d’Everett pour conserver le paradoxe du chat est contradictoire avec la relativité restreinte qui jusqu’à plus ample informé est vérifiée en permanence ; toute propagation  de l’information est bornée par la célérité d’une onde  ce que nous démontre  notre quotidien au-delà même des mesures en laboratoire.

 

Autre point : l’avalanche des évènements produit par une transition quantique ne saurait se résumer à une propagation univoque d’une information. Pour reprendre l’effet d’intrication la sélection d’un état induit une information opposée dans la particule corrélée, donc l’intrication implique la sélection d’un état binaire. Mais dans le cas d’une avalanche évènementiel d’un bout à l’autre de l’univers qui ferait basculer l’univers entier dans un autre état quantique suite à la transition d’une seul quanta –limite de la mégalomanie quantique- on ne saurait humainement décrire la quantité effrayante d’information qui se propagerait pour re décrire le nouvel état de l’univers –depuis l’inscription fine du nouvel état du chat dans la mémoire neuronale de l’observateur jusqu’à, qui sait, un effet catastrophique à l’autre bout de l’univers.

Et cette quantité énorme d’information pour décrire de façon distincte les deux univers-fils l’un où le chat est vivant et l’autre où il est mort n’a rien à voir avec une corrélation quantique mesurée pour des particules intriquées.

La dernière extrémité du raisonnement est qu’il n’y a même pas, suite à la transition quantique, création de deux univers fils où chacun demeurerait cohérent face au résultat de la transition mais purement effet de sélection d’un type d’univers préexistant sans aucune propagation d’information même avec une vitesse infinie. Pour que l’hypothèse d’Everett ait un sens il faudrait que les univers en cascade en quelque sorte préexistent et donc que tous les univers cohérent de toutes les transitions quantiques et de toutes leurs conséquences possibles du début jusqu’à la fin des temps préexistent. Donc qu’il n’y ait en fait ni temps ni propagation d’information ni notions d’espace mais juste des univers figées où toute mémoire ne serait pas le reflet d’une histoire mais juste d’un état lié à l’univers dans lequel les observateurs seraient plongés. Un total renversement de perspective où les évènements n’existeraient pas et où les différents états quantiques seraient juste le reflet des différences entre ces univers sans qu’il y ait même de transition quantique.

Cette mise en abime de la vision d’Everett nous fait sortir de toute physique, elle est par essence même contradictoire de toute approche physique.

 

Et si l’interprétation d’Everett ne tient pas alors l’univers doit demeurer auto-cohérent face à la transition de la particule et à l’état du chat qu’il mesure sur lui-même donc l’observateur ne peut que constater qu’un état cohérent de la propre observation du chat. Son observation n’ajoute rien à l’univers, tout au plus  sa mémoire acquiert une information nouvelle.

 L’information impropre acquise par l’observateur extérieur doit être identique à l’information propre mesurée localement.

Cette interprétation de la réalité physique est évidemment infiniment plus simple que l’extrémisme quasi métaphysique d’un univers entier qui serait sélectionné pour être cohérent des différents  états quantiques..

Le chat était vivant ou mort (au détail statistique de la transition de la fiole par effet tunnel ce qui laisse une faible probabilité d’un chat  plus ou moins malade).

Même non observé par l’observateur, le chat se sent vivant ou il est malheureusement mort  et quand il ouvre la porte l’observateur n’acquiert qu’une information binaire qui existait déjà !

 

Il est nécessaire à ce stade de répondre à la question plus fondamentale : pourquoi faut-il que la description entre l’état avant ou après l’observation soient à ce point distincts

 qu’une apparence de paradoxe soit soulevée.

Pourquoi devons nous considérer avant l’observation un état superposé (particule non désintégré-chat vivant) et (particule désintégrée –chat mort) ,. Cette union des deux termes indique que pour un observateur avant l’observateur il ya dans son espace –temps local un état simultané et contradictoire au sens de l’information classique.

Mais  cette simultanéité selon le temps de l’observateur externe est au cœur de la confusion et de l’erreur d’interprétation. Le temps évènementiel de l’observateur ne s’applique pas à la description d’un système décrit par la physique quantique entre deux observations.

Quant un système décrit par le formalisme quantique émet une information, typiquement un photon,  la propagation de l’information est  décrite comme la propagation d’une onde qui porterait comme information la probabilité de telle ou telle valeur propre pour ses observables (position spatiale versus quantité de mouvement, position temporelle versus niveau d’énergie). Or tant que la mesure n’a pas été effectuée toutes ses potentialités demeurent et se propagent. Si on ne ne mesure pas sa localité spatiale ou temporelle, typiquement en définissant un écran avec des détecteurs en différents points de passage, cette onde s’exercera lors de l’absorption du photon comme un guide qui formera une figure d’interférence si d’autres photons sont émis dans les mêmes conditions. On a l’effet onde. Inversement déterminer la localisation du porteur de l’information revient à sélectionner une valeur propre et donc à interrompre la propagation du spectre de valeurs. Les franges d’interférence seront remplacées par les figures déduites de la simple diffraction des photons sur les fentes de détection qui deviennent des émetteurs secondaires. On a l’effet particule. Cette dualité est bien connue mais la conclusion est rarement tirée. Elle s’appelle interprétation transactionnelle de la physique quantique et consiste à constater que l‘onde complexe propageant l’information devient une onde réelle lorsque l’expérience localise le porteur d’information.

Si une expérience localise le quanta elle détermine le chemin suivi par ce quanta, l’interférence n’est plus possible et on est en présence d’une propagation classique.

Envisageons que l’interaction entre le quanta et le système de mesure le localisant induisent une onde avancée qui remonte le temps vers la source.

La formation d'une onde avancée lors de la réception induit  en  tout point entre l'émission et la réception la détermination de  l'observable par sommation des ondes avancées et retardées. Il y a réflexion totale car l'énergie émise est égale à l'énergie reçue (expérience iso quanta) :

La sommation des deux ondes élimine la partie imaginaire ; seule subsiste la partie réelle comme dans une onde classique.
Cette onde réelle est la simple sommation de l’onde complexe  retardée qui a propagé l’information jusqu’au détecteur et d’une onde avancée qui remonte le temps de l’expérimentateur entre la détection jusqu’à l’instant de l’émission. En outre les expériences de choix retardé démontre qui est possible d’influencer le type de réception onde ou particule après le passage supposée du quanta : toute écran intermédiaire sur le chemin entre le point d’émission et de réception impacte la décision finale comme si une information devait remonter dans notre écoulement du temps depuis l’instant du choix retardé jusqu’au moment de la réception sur l’écran final sans aucun porteur d’information puisque le quanta est déjà passé au delà de l’écran intermédiaire. En fait il est tout à fait vain et inapproprié d’appliquer le temps de l’observateur externe à un écoulement des évènements entre l’émission et la réception. Notre temps n’est qu’un temps évènementiel constitué par  la succession des couples émission/ réception mais tout ce qui se produit entre ces deux instants relève d’un temps non stabilisé au sens évènementiel, un temps propre à l’évènement qui peut revenir en arrière tant que l’évènement n’est pas fixé par l’ensemble des conditions s’interposant entre les positions spatiales et temporelles des deux extrémités : émission et réception du quanta.

Il y a une conclusion fondamentale à cela, c’est que la superposition quantique : le spectre des valeurs formé par la combinaison linéaire des états propres observables est compris comme une association simultanée d’information contradictoire parce que nous l’interprétons dans notre temps propre d’observateur alors qu’il s’agit d’une information non stabilisée tant que l’ensemble des conditions (mesure par interaction ou absence de mesure par absence d’interaction) n’a pas été totalement établi entre les évènements émission et réception